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DÉMÉNAGEMENT

un film de Shinji Sômai
Japon - 1993 - 124'
SUISA 1020.459
date de sortie: 15.05.2024

Renko, onze ans, rêve d'une famille unie et heureuse mais voit avec douleur ses parents se séparer. La petite fille se révolte d'abord intérieurement puis finit, traumatisée, par commettre des actes insensés prouvant combien son psychisme est perturbé. D'une surprenante maturité, elle refuse cependant d'accepter la situation et son attitude devient de plus en plus extrême et dangereuse pour elle-même et son entourage. .

« Parfois, on se demande bien quel est l’intérêt de sortir tous ces nouveaux films qui n’arrivent pas à la cheville de plus anciens qu’on ferait mieux de remontrer sur grand écran ou, pire, qui n’y ont jamais eu droit. Ainsi de Déménagement, du Japonais Shinji Somai, sélectionné à Cannes en 1993 dans la section Un Certain Regard mais resté ensuite inédit dans les salles occidentales, de même que toute l’œuvre (13 films) de son auteur. Restauré en format digital 4K (le top) et représenté à la Mostra de Venise l’an dernier, le voici neuf comme au premier jour. Avec le recul, Shinji Somai (1948-2001) apparaît aujourd’hui comme le principal chaînon manquant entre la génération de la «nouvelle vague japonaise» des années 1960 (Shohei Imamura, Nagisa Oshima, Yoshishige Yoshida, etc.) et celle révélée au début des années 2000 (Kiyoshi Kurosawa, Hirokazu Kore-eda, Naomi Kawase, etc.). » — Norbert Creutz, Le Temps

« A travers la révolte d’une petite fille de Kyoto à l’esprit frondeur et Nouvelle Vague, le réalisateur japonais décrit les émotions caractéristiques de l’enfance et du passage à l’âge adulte... avec une telle délicatesse et une telle poésie qu’il leur insuffle une puissance saisissante! » ★★★★ CHEF-D’ŒUVRE — Raphaël Chevaley, Arcinfo

« Adulé dans l'Archipel, l’œuvre réapparaît en octobre dernier sur les écrans français dans une version remastérisée. Et voilà que le public romand peut enfin découvrir cette magnifique peinture de l'adolescence. Des plans composés comme de tableaux (Toyomichi Kurita), une lumière étourdissante (et un brin vintage), musique envoutante (Shigeaki Saegusa) et des performances bouleversantes; entre l'émancipation de la mère et le déclassement social du père, «Déménagement» encapsule à la fois le Japon au seuil du XXIe siècle, et les pérégrinations d'une enfance esseulée. Onirique, contemplatif; il y a 1001 raisons d'aller faire un tour du côté de ce chef-d'œuvre resté secret pendant trente ans. » — 5/5★ Theo Metais, Cineman

« On y mesure le talent du cinéaste à sa façon de transcender un sujet banal: le divor­ce d’un couple, vu par leur fille unique. D’abord, par la finesse de l’écriture. Au-delà des sentiments de la jeune Ren, tiraillée entre espoir et ­résignation, Sômai excelle à restituer la lucidité sous-estimée de l’enfant, souvent plus adulte que ses parents. Il a aussi trouvé l’interprète idéale en Tomoko Tabata, dont l’énergie juvénile irradie l’écran. » — Mathieu Loewer, Le Courrier

« Je suis convaincu qu'au même titre que d'autres cinéastes de sa génération comme Edward Yang, Hou Hsiao-hsien ou Takeshi Kitano, le nom de Shinji Sômai mérite aujourd'hui, plus que jamais, d'être redécouvert. » — Hirokazu Kore-eda

« Où tu vas, Ren ? Ren court. A toutes jambes, dès le début, ou presque : Déménagement commence comme un autre film, c’est un repas du soir, dans une petite famille en forme de triangle, le père, la mère, entre eux l’enfant, Ren. On est avec elle, pour rejoindre, ou tenter de suivre, un mouvement qui ne commence vraiment que dans les scènes suivantes. Où Tomoko Tabata, qui alors âgée d’une douzaine d’années, joue de toutes ses forces Ren dans Déménagement, va devenir, en quelques minutes et pour toujours, une apparition inoubliable, singulière – personnelle comme seule une personne peut l’être – donnant à un point rare, rare au cinéma mais absolument cinématographique, le sentiment du vivant. Ren est au lit, bien bordée et bien sage comme une enfant qui dort profondément, mais elle ouvre les yeux et nous regarde directement, puis se lève, ouvre la fenêtre, dit quelque chose sur la pluie (simplement pour établir le premier contact, entamer l’adresse : se parlant à elle-même, c’est au film, c’est à nous qu’elle parle), se renverse sur les mains et fait le poirier. Tout se renverse en même temps qu’elle, et le film se met à courir, «où tu vas, Ren ?» à la suivre de travelling en travelling, à indexer sa durée, celle de ses plans, son rythme, sur la fuite en avant de Ren. Sans en dire trop ni pas assez, le cinéaste Shinji Somai, par on ne sait quelle audace née de son sens de l’existence ou (si ce n’est la même chose) de son goût pour le plan-séquence, s’est montré capable de prouver que le cinéma permet ceci, son cœur, sinon son essence, et qui est du genre fantastique : prendre dans ses bras, avec tendresse, l’enfant qu’on a été, un instant, et non pas pour le retenir, mais pour mieux le laisser partir. Le cinéma a fait son travail, le film peut bientôt s’arrêter de courir, et laisser le monde s’éloigner.» — Luc Chessel, Libération

« En tant que cinéaste, qu’un être de la sorte puisse exister dans un film est à peine croyable. Les images en sont comme autant de preuves de son énergie vitale – mais alors, la puissance de vie qui se loge là, sans doute existe-t-elle aussi en nous-mêmes, l’avons-nous seulement employée à sa juste valeur ? Tel est le genre de remises en question auquel nous sommes alors contraints. La vie, ici réinsufflée. » — Ryusuke Hamaguchi

« De l'enfance, Sômai filme l'in­flexibilité, l'intransigeance. La petite Renko n'a rien d'une fillette kawaï ("mignonne"), mais se montre au contraire assertive, âpre à la défense de ses intérêts d'enfant, c'est-à-dire à la sauvegarde de son royaume menacé, quand bien même il faudrait pour cela conserver ses parents dans le formol. Elle les défie droit dans les yeux, esquive leurs règles (elle déchire la charte de bonne con· duite écrite par sa mère), édicte les siennes propres (son père l'écoute la tête baissée, abattu).  La caméra de Sômai elle-même est entrainée, happée, par le mouvement de ses personnages. » — Mathieu Macheret, Le Monde

« Chaînon manquant entre la Nouvelle vague des années 1960 et le renouveau de la fin des années 1990 sous l’égide des ‹4K› (Kitano, Kurosawa, Kawase, Kore-eda), le film participe à la réinvention du shomingeki, genre endémique de la production japonaise qui se concentre sur la vie quotidienne de la classe moyenne. » — Thomas Grignon, Critikak

Avec Kiichi Nakai, Junko Sakurada, Tomoko Tabata, Mariko Sudo, Tarö Tanaka, Ippei Shigeyama

Scénario et dialogues Satoshi Okonogi, Satoko Okudera et Hiko Tanaka Image Toyomichi Kurita Son Shigeaki Saegusa Montage Yoshiyuki Okuhara Production Argo Pictures et Yomiuri Television

« J'ai le sentiment que le nom de Shinji Sōmai n'est pas encore connu et reconnu des amateurs et des critiques de cinéma en dehors du Japon. J'ai notamment pu le constater lors de mes passages dans les festivals internationaux où, lorsqu'on me demande quel réalisateur japonais j'apprécie et que je cite son nom, ou bien que je cite Typhoon Club comme étant l'un de mes films japonais préférés, la réaction des spectateurs et des journalistes est sans équivoque. Déménagement est le film qui constitue une transition et un aboutissement dans la filmographie de Sômai. Bien qu'il ait un recours plus modéré aux longs plans-séquence qui sont habituellement sa marque de fabrique, il prouve plus que jamais son talent à tirer le meilleur de ses acteurs en mettant brillamment en scène l'excellent scénario de Satoko Okudera qui suit le voyage intérieur de cette petite fille. Après l'avoir vu, j'ai eu la confirmation que Shinji Sômai était le meilleur cinéaste de sa génération, ce qui le plaçait d'emblée comme étant l'unique réalisateur vivant que j'espérais rattraper. Je suis convaincu qu'au même titre que d'autres cinéastes de sa génération comme Edward Yang, Hou Hsiao-hsien ou Takeshi Kitano, le nom de Shinji Sômai mérite aujourd'hui, plus que jamais, d'être redécouvert. » Hirokazu Kore-eda